Le mot #64 : Janvier

par François Cerruti-Torossian | le 8 janvier 2018

Janvier, d’où viens-tu ?

Etre à la charnière d’entre les deux années : le mois de Janvier a ceci de particulier.

En effet, le terme de « Janvier » passe aujourd’hui inaperçu en français et l’on ne saurait que très difficilement en donner spontanément son origine. Elle est pourtant riche et fondamentale.

Un dieu nommé Janus

Le mois grégorien de « Janvier » provient tout simplement du mois romain de « Januarius », mois dédié à l’ancien roi d’Italie devenu grand dieu romain et appelé « Janus », dieu emblématique des débuts et des achèvements, dieu du passé et de l’avenir, perpétuellement placé dans une sorte de « présent d’éternité » comme l’on disait encore autrefois dans les vieilles grammaires françaises des années 50.

Il est d’ailleurs souvent dénommé « Janus bifrons », ce qui signifie « Janus aux deux fronts (donc aux deux visages ». Il est vrai que Janus est par excellence le dieu qui affronte tant le passé que l’avenir, qui fait face et prend de front tant l’année écoulée que l’année à venir.

Janus est au cœur du temps des hommes. C’est un dieu de traverse, de passages, de moments essentiels où la décision humaine une fois prise marque de son empreinte son temps. A cet égard, on ne peut que noter la proximité de « Janus » avec le nom latin « Janua » signifiant « Porte », il était ainsi un peu dieu des portes, gardien des entrées et des sorties.

L'Arc de Janus quadriface à Rome.

L’Arc de Janus quadriface à Rome.

Janus, dieu de la Paix

Polymorphe, ce dieu fascinant fut également appelé « Janus quadrifrons », c’est-à-dire « Janus aux quatre fronts (ou quatre visages) ». A vrai dire, c’est le Temple qui lui était dédié sur le Forum romain qui en parle le mieux. Il s’agit de l’Arc de Janus, temple carré aux quatre façades et qui possédait en son sommet une représentation du dieu Janus aux quatre visages.

Ouvert uniquement en temps de guerre et fermé seulement en temps de paix retrouvée, le Temple du Janus quadriface révèle toute l’importance que ce dieu pivot occupait parmi les Romains : dieu invoqué en moments graves et stratégiques où les destinées sont en jeu, comme si seul Janus pouvait savoir quand commence et finit la guerre, pause terrible dans la vie des hommes.

L'Arc de Janus surmonté de sa tête quadriface

L’Arc de Janus surmonté de sa tête quadriface

Janus, dieu des Banquiers

Plus surprenant, Janus est aussi dieu des conversions, en effet, son passage éponyme sur le Forum romain abrita la Bourse de Rome, où commerçaient marchands et changeurs. Il se faisait ainsi, en quelque sorte, dieu des banquiers, dieu du grand changement, du change et de l’échange de l’argent.

Une incantation januale…

Pour le Jour de l’An, il nous est resté ces vers d’Ovide, dans Les Fastes, que l’on devait certainement réciter à l’image d’une prière au dieu Janus aux mille et unes facettes :

« Dieu à double visage,

C’est de toi que part l’année pour s’écouler sans bruit;

Toi qui, sans tourner la tête, vois ce que nul autre dieu ne peut voir,

Montre-toi propice aux chefs dont l’active sollicitude donne le repos à l’Océan et la sécurité à la terre, qui nous prodigue ses trésors;

Montre-toi propice à tes sénateurs, au peuple romain,

Et, d’un signe, serre les portes de ton candide sanctuaire. »

Alors, avec notre ami, le dieu Janus, Paisible et Fastueuse Année 2018 à vous tous !

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