Le mot #7 : Pérenne

par Jérôme Chiavassa-Szenberg | le 4 septembre 2013

Pérenne

Et si l’on faisait un détour sur les mots à la mode dans les « briefs » (sic) de création ? La récurrence de l’un d’entre eux nous donne envie de spéculer et délirer un peu à partir de son étymologie… : ce mot qui nous questionne est pérenne.

Pérenne est un adjectif dont la définition est la suivante : « qui dure longtemps, qui est perpétuel » (Robert Dixel 2013). Le mot vient du latin perennis, e dont la signification première est « qui dure toute l’année » (dictionnaire Gaffiot, Hachette, 1934) ou « qui dure, solide durable ».

Perennis se décompose lui-même en per et annus. Per est une préposition qui a un sens local, spatial dont la traduction en français varie selon le contexte :  « à travers », « sur toute l’étendue de », « le long de, devant », etc. La préposition a aussi un sens temporel : « durant (sans discontinuité) » ou traduit l’idée d’une succession (ex. :  per singulos dies « tous les jours, chaque jour »). Annus , i est un nom masculin se traduisant par « année » ou, dans le vocabulaire poétique, par « saison ».

Est donc pérenne ce qui dure toute l’année, toutes les années et  qui revient toujours chaque année ou tout au long de l’année. Comme le cycle des saisons. L’idée de pérennité était bien liée d’ailleurs, dans la conception antique, au retour à l’identique dans le temps : une théorie de l’éternel retour. Les Anciens pensaient, pour certains, qu’au terme d’une « grande année » (annus magnus) les phénomènes se reproduisaient identiquement. Cette idée venait de l’observation astronomique – on observait que les positions relatives des planètes connues, du soleil, de la lune se répétaient. La Grande Année était la période de répétition de la configuration du ciel observé. Cette notion évolua rapidement en théorie de la précession des équinoxes (changement de direction de l’axe de rotation de la terre) grâce à Hipparque, astronome et mathématicien du IIe siècle.

Grâce à lui, on pourrait s’amuser à chiffrer le nombre d’années que dure la pérennité si l’on suppose maintenant qu’est pérenne ce qui dure une grande année ou revient à chaque grande année. Et même si ce n’est pas toute à fait l’éternité au sens d’un temps infini, c’est tout de même sacrément long. En effet, Hipparque calcula qu’elle durait 25.920 ans ! Si l’on préfère se tourner vers les conceptions modernes, descendantes lointaines de la notion, on devra se dire qu’est pérenne ce qui dure 225 à 250 millions d’années : c’est là la durée de l’année galactique qui est la période de révolution du Soleil autour du centre de rotation de la Voie lactée.

Bref, éternité ou pas, quand une marque vous dit qu’elle est pérenne, elle est là pour un sacré bout de temps. Non, non, sans exagérer !

On adore les briefs, d’autres extrapolations à venir !